Actualités 25 avril 2019 par telemartin.tv
Depuis quand parle-t-on espagnol ? L’espagnol, a-t-il toujours été parlé ? La réponse est…non. L’espagnol est une langue dite romane ou latine car elle provient du latin, tout comme le français, l’italien, le roumain, le portugais. Ce sont les Romains venus d’Italie qui l’introduisent en Europe.
La Péninsule Ibérique est le premier pays à être envahi par les Romains, bien avant la Gaule par exemple : on y parle donc un latin qualifié d’archaïque. C’est de ce latin parlé archaïque que dérive la langue espagnole. Il est désigné sous le nom de latin vulgaire car il est parlé par le peuple (vulgus en latin). Il est dit archaïque car c’est un latin exporté assez tôt et qui n’a donc guère évolué, à l’inverse du latin parlé en Gaule qui, ayant été exporté beaucoup plus tard (en 58 avant J.C), avait renouvelé son lexique. Cette différence entre latin archaïque et latin tardif se manifeste dans le vocabulaire : on dit table en français (latin TABULA) mais mesa en espagnol (lat. MENSA), on dit parler en français (lat. PARABOLARE) mais hablar en espagnol (lat. FABULARE), on dit hallar en espagnol (lat. AFFLARE) mais trouver en français (lat. TROPARE, dont l’origine d’ailleurs est très controversée). Dans les autres pays d’Europe se développeront en parallèle des latins vulgaires différents : c’est de ces latins que naîtront les langues romanes : le français, l’italien, le portugais, et le roumain. L’éclatement puis la chute de l’Empire romain est à l’origine de cet éclatement linguistique.
C’est au Vème siècle après J.C. que l’espagnol commence à prendre forme à l’époque où le latin entame son déclin. Des peuples germaniques déferlent sur l’Europe et envahissent la Péninsule Ibérique. Ils parlent une langue germanique qu’aucun autochtone romanisé ne comprend et dont la rudesse des sonorités ressemble à un « barabara » continu, ce qui leur vaut le nom de « Barbares ». Entre le Vème et le VIIIème siècle en Péninsule Ibérique sous les règne des Wisigoths, latin parlé et langues germaniques se mélangent. Ces dernières laissent des traces dans la langue espagnole : ces traces sont appelées le « superstrat germanique ». Des mots tels que guerra (WERRA), estribo (STREUP), jabón (SAIPO), falda (FALDA), ou encore ropa (RAUPA) sont des mots d’origine barbare… Le mot Andalucía lui-même dérive de Al-Andalus. Ce mot a pour origine « al-vandalus » (al, article arabe et vandalo, vandales, peuple d’origine germanique), adaptation arabe de Portus Vandalusius, désignant à l’origine le port d’où partirent les vandales.
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Au VIIIème siècle, plus précisément en 711, les Arabes envahissent la Péninsule Ibérique qu’ils occuperont jusqu’au XVème siècle. L’arabe s’impose comme langue de culture et comme langue administrative. Toutefois, l’espagnol appelé à l’époque romance, est déjà bien consolidé. Il s’arabise et finit par former ce que l’on appelle le mozárabe. Le mozárabe est parlé par tous, y compris par les arabes eux-mêmes qui connaissent cette langue et la pratiquent à l’oral, bien qu’ils privilégient l’arabe à l’écrit. Parmi les premiers textes écrits en langue espagnole, on trouve ainsi de petits poèmes Las Jarchas, datant du XIème siècle, écrits en fait en mozarabe.
L’arabe influence considérablement l’espagnol : les mots commençant par al ou a incorporent au mot l’article arabe al. On les trouve dans le vocabulaire de la maison (azotea, alcantarilla), des aliments (arroz (riz sans article en français), azúcar (sucre), algodón (coton), aceituna), du commerce (aduana, almacén, zoco, maravedí), de l’administration (alcalde, alguacil), des professions (albañil), de l’habillement (almohada, alfombra), du jeu (ajedrez, azar, naipe). De nombreux noms de lieux sont formés à partir de Guad, wadi ‘le fleuve’ : Guadalquivir, Guadalajara.
C’est sous l’occupation arabe que l’espagnol en tant que tel voit le jour. Le premier texte écrit en langue espagnole date du Xème siècle. Ce sont des « gloses » que l’on retrouve en marge des manuscrits latins recopiés par les moines. Ces derniers, jugeant que les lecteurs de l’époque ne comprenaient plus le latin, avaient apposé dans la marge la traduction de certains passages dans une nouvelle langue qui n’était autre que…l’espagnol. Ces Gloses sont appelées Glosas Silenses et Glosas Emilianenses : les premières émanent du Monastère de Silos situé dans la région de Burgos et les secondes de San Millán de la Cogolla situé dans la région de La Rioja.
Enfin, c’est au XIIème siècle que le premier grand texte de la littérature espagnole voit le jour : le Cantar de Mio Çid, chanson de gestes, écrite en vers qui retrace les exploits de Rodrigo Díaz de Vivar, dit le Çid, parti à la reconquête de la Péninsule. Son nom écrit à l’époque avec un ç et prononcé « ts », tire son origine de l’arabe Said qui signifie « mon maître ». L’espagnol était né et allait connaître le développement et le destin que l’on sait : être aujourd’hui l’une des langues les plus parlées au monde.
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